Accepter la greenflation est la meilleure des options

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Face aux conséquences du dérèglement climatique, l’unanimité dira qu’il n’y a pas de bonne option. La première serait de ne rien faire et de subir les conséquences climatiques,  humaines et financières du réchauffement de notre planète.

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Face aux conséquences du dérèglement climatique, l’unanimité dira qu’il n’y a pas de bonne option. La première serait de ne rien faire et de subir les conséquences climatiques,  humaines et financières du réchauffement de notre planète. La seconde serait de mettre en place une politique de transition qui pourrait avoir des effets à la hausse sur l’inflation, à savoir ce que l’on nomme désormais la greenflation ou l’inflation verte.

Nul besoin de préciser que la seconde option est de loin la moins pire. Même si, inéluctablement, il faut dès à présent accepter que les politiques de transition risquent d’avoir des effets sur l’inflation en raison de la hausse des prix de l’énergie, du prix du carbone et des prix des matières premières critiques, nécessaires aux énergies renouvelables. Et une chose est certaine, plus la transition sera mise en œuvre tôt et de manière graduelle, plus les coûts liés à cette inflation seront faibles.

L’Europe à la pointe

Rappelons, pour commencer, que la transition est déjà en marche en Europe avec le vote du Parlement européen, en avril, qui a inscrit en textes législatifs, l’objectif de réduire les émissions de GES (gaz à effet de serre) d’au moins 55% d’ici 2030.

Par ce vote, le Parlement entérine l’élimination progressive des quotas gratuits dans le cadre du système SEQE, système d’échange de quotas d’émissions, d’ici 2026. Avec la mise en place d’un nouveau SEQE II pour le transport routier et les bâtiments à partir de 2027. Mais le Parlement européen a été plus loin en incluant, pour la première fois, les émissions de GES du secteur maritime dans le SEQE et en approuvant la révision du SEQE pour l’aviation. Cela permettra de supprimer progressivement les quotas gratuits pour le secteur de l’aviation d’ici 2026 et de promouvoir l’utilisation de carburants durables.

Un autre point important consiste en l’adoption d’un nouveau mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de l’Union (MACF), et je cite le communiqué du Parlement, « ce mécanisme vise à encourager les pays tiers à accroître leur ambition climatique et à veiller à ce que les efforts de l’UE et de la planète ne soient pas compromis par la délocalisation de la production de l’Union vers des pays ayant des politiques environnementales moins ambitieuses ». Les importateurs de fer, d’acier, de ciment, d’aluminium, d’engrais, d’électricité et d’hydrogène seraient alors tenus de payer toute différence de prix entre le prix du carbone payé dans le pays de production et le prix des quotas de carbone dans le cadre du SEQE de l’UE.

D’où viendrait la greenflation ?

Cette inflation pourrait être générée par plusieurs facteurs, en même temps ou avec des effets décalés dans le temps.

Le premier facteur viendra inéluctablement de la hausse des prix des énergies fossiles. Car l’objectif de la taxe carbone est de renchérir le coût de l’utilisation de ces énergies pour inciter les entreprises et les ménages à se tourner de plus en plus vers les énergies renouvelables. Le prix du carbone qui végétait à 20 euros avant l’annonce du Green Deal européen se situe actuellement autour des 100 euros, et dans les scénarios esquissés, le prix pourrait s’envoler entre 200 et 800 euros, entrainant un renchérissement des prix de l’électricité.

Autre facteur potentiellement inflationniste, des tensions pourraient également apparaître sur les marchés des minéraux essentiels à la transition, entrainant des hausses de prix. L’Agence Internationale de l’Energie estime que la demande de minéraux industriels liée à la transition devrait être multipliée par 6 d’ici 2040, dans un scénario « zéro émission nette ».  

A contrario

A côté de ces deux facteurs qui semblent à priori inflationnistes, il faudra tenir compte des transformations, au sein du système économique, que cette transition va provoquer avec un risque non négligeable, un ralentissement de l’activité qui entrainerait alors une baisse de l’inflation.

Transformation sur le marché du travail, où nous assisterons alors à un énorme déplacement de la main-d’œuvre qui sera réallouée vers des activités bas-carbone ou dans des secteurs qui vont connaitre des grands bouleversements (comme le secteur de la rénovation des habitations) et qui vont être confrontés à des pénuries de main-d’œuvre. Cela pourrait entrainer de façon concomitante une hausse des salaires et une augmentation du chômage dans certaines catégories de métiers.

Sur le marché des biens et services, la transition entrainera un renchérissement des biens et services carbonés par rapport aux autres biens et services, alors que le développement  des technologies bas‑carbone pourrait réduire les coûts de production et avoir un effet désinflationniste.

Après avoir répondu à ce que signifie le terme « greenflation », la question est dès lors de savoir si elle sera vraiment inéluctable et si oui, quelle en sera son ampleur. Mais pour pouvoir y répondre précisément, il faut se poser la question de savoir si cette transition se fera rapidement et de façon graduelle.

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