La BOJ, qui se débat depuis des années avec une inflation trop faible, voire avec de la déflation dans le passé…
Tout dépend de nous
La BOJ, qui se débat depuis des années avec une inflation trop faible, voire avec de la déflation dans le passé, fait face à un risque bien réel d’un retour de cette déflation.
Risque de déflation
Commençons donc d’abord par les derniers chiffres sur l’inflation au Japon, qui montrent que l’inflation a reculé de 0.9% en novembre en taux annuel, soit le plus fort déclin depuis septembre 2010 (voir graphique).
Ce nouveau recul fait plonger l’inflation dans la zone de déflation ce qui réveille de mauvais souvenirs aux autorités monétaires et politiques japonaises. Ce nouveau recul est la résultante de la faiblesse du prix du baril, des réductions de prix par le gouvernement sur les voyages intérieurs et à cause de la faiblesse de la demande.
Je voudrais ouvrir ici une petite parenthèse pour souligner l’importance pour les gouvernements, avant de prendre des décisions, d’en mesurer les conséquences. L’exemple ici est sans trop de conséquence, quoi que, car en décidant de réduire le prix sur les billets pour favoriser les voyages intérieurs, le gouvernement japonais a contribué à enfoncer l’inflation en territoire négatif. On pourrait d’ailleurs dire la même chose du gouvernement allemand, qui, en baissant la TVA de juillet à décembre, a contribué à la baisse de l’inflation en territoire négatif en zone euro.
Dans les deux cas les conséquences sont encore limitées. Mais dans un papier écrit ce mercredi intitulé « quel rôle pour les économistes dans la crise ? » Hélène Rey, pointe une autre décision beaucoup plus lourde de conséquence. Je la cite ; « Thiemo Fetzer de l’université de Warwick a analysé l’effet de la politique de subventions gouvernementales pour les repas aux restaurants mise en place au Royaume Uni pour un cout de 500 millions de livres. Le but était d’aider le secteur de la restauration après le premier confinement. Utilisant des données de Google mobility, il a démontré que les restaurants qui participaient ont bien vu une augmentation de leur clientèle, parfois massive. Mais malheureusement, entre 8 et 17% des nouveaux foyers d’infection du COVID ont pu être attribués à cette politique dont la valeur économique s’est avérée de courte durée et dont les conséquences sanitaires ont été désastreuses ».
Refermons cette parenthèse, qui mériterait cependant certainement un plus large développement.
Le Japon est donc confronté à un retour de la déflation et une nouvelle vague de contamination risque encore d’accentuer le phénomène en pesant sur la consommation.
La BOJ, qui s’est réunie ce matin, a, sans surprise, décidé de maintenir sa politique monétaire inchangée et a prolongé de six mois une série de mesures visant à soulager les difficultés de financement des entreprises touchées par la crise du coronavirus.
Mais elle a quand même un peu surpris en déclarant « étant donné que l’économie et les prix devraient rester sous pression pendant une période prolongée en raison de l’impact du Covid-19, la BOJ va étudier les moyens d’arriver à un nouvel assouplissement monétaire efficace et durable ».
En attendant, la BOJ a maintenu intacte ses cibles de contrôle de la courbe des taux de -0,1% pour les taux à court terme et de 0% pour les rendements obligataires à 10 ans.
Points de désaccord
On espérait un accord ce vendredi aux Etats-Unis, mais un point de désaccord est apparu et qui n’a absolument rien d’anodin. Ce dernier porte sur le fait que les républicains veulent s’assurer que la Fed et le Trésor ne puissent rétablir les facilités de prêt en cas de pandémie qui devaient se terminer le 31 décembre suite à une décision du secrétaire au Trésor Steven Mnuchin. Cela lui permettait de récupérer quelque 455 milliards de dollars qui seraient utilisés pour aider à payer les aides aux particuliers et aux petites entreprises.
Mais en agissant de la sorte, cela lierait le gouvernement de Biden et en particulier Janet Yellen, et l’empêcherait de soutenir les marchés financiers en cas de nouvelles turbulences.
Il y a urgence car il faut un accord avant la fin de l’année pour apporter une nouvelle aide aux chômeurs, mais aussi parce que le marché de l’emploi se retourne comme l’ont confirmé les derniers chiffres.
Et c’est encore le cas (voir graphique) avec les inscriptions hebdomadaires au chômage qui sont passées de 862.000 à 885.000.
Pas d’accord non plus concernant le Brexit, et là aussi le temps presse.
En attendant, la BOE a laissé ses taux inchangés et maintenu son programme de soutien tout en déclarant qu’elle tolérerait une inflation temporairement plus élevée si la livre sterling plongeait après un Brexit sans accord.
Et manifestement ce n’est pas l’optimisme débordant de part et d’autre, Boris Johnson a averti que le temps était compté et qu’un scénario de non-réalisation d’un accord était “très probable”, et Ursula von der Leyen, qu’il était “très difficile” de combler les différences, en particulier sur la question des droits de pêche.
Et pendant ce temps…
Le virus galope. Avec plus de 800 morts hier en Allemagne, avec de nouvelles mesures de restriction à partir de demain en Grande-Bretagne, et l’annonce d’un confinement généralisé en Pologne.
Avec évidemment l’épisode Macron, qui prêterait presque à sourire, sauf que l’annonce de sa contamination a obligé toute une série de responsables politiques en France à s’isoler. Mais ailleurs aussi à cause du sommet européen de la semaine passée où il a côtoyé beaucoup de monde.
Et la situation pourrait encore empirer si nous ne sommes pas responsables et attentifs aux autres durant les fêtes. N’oublions pas que notre bonheur dépend de celui des autres, ce qu’on appelle la compersion, à savoir le bonheur qu’on peut éprouver lorsqu’on est témoin du bonheur ou de la joie de quelqu’un d’autre. Et qu’en étant extrêmement attentif et en respectant les gestes barrières et la distanciation sociale, nous aurons le bonheur de voir la joie de nos proches durant longtemps.
Ce n’est pas encore l’heure des vœux, même si j’espère que la semaine prochaine nous aurons au moins un accord aux Etats-Unis et sur le Brexit. Mais pour reprendre la phrase d’Edgard Morin « l’espérance n’est pas certitude. Dire qu’on a de l’espoir, c’est dire qu’on a beaucoup de raisons de désespérer. Nous ignorons les limites du possible, d’où la justification de l’espérance, mais nous savons qu’il a des limites, d’où la confirmation de la désespérance. L’espérance du possible s’enfante sur fond d’impossible ».
Vous l’avez compris, la semaine prochaine, je fais une pause, et on se retrouve le lundi 28 décembre. Et je vous souhaite donc déjà une excellente fête de Noël.