La conférence de presse de Christine Lagarde était hautement symbolique car, elle s’est bien évidemment tenue …
La grande solitude de la BCE
La conférence de presse de Christine Lagarde était hautement symbolique car, elle s’est bien évidemment tenue en vidéoconférence, mais devant une salle de presse vide, ce qui a rendu encore plus marquant la solitude de l’intervention de la BCE.
Une BCE bien seule
La conférence de presse de Christine Lagarde, jeudi passé, a donné le sentiment que cette dernière était dépassée par les événements et par l’ampleur de la crise, même si elle a martelé à plusieurs reprises que la BCE serait flexible, déterminée et décidée.
Mais Christine Lagarde, comme Powell la veille au soir, a insisté sur le caractère violent de cette crise et rappelé que même pour la BCE faire des prévisions était extrêmement compliqué. Que le retour à la normale ne se ferait pas avant 2021, et que selon les prévisions de la BCE la croissance en zone euro en 2020 devrait chuter entre 5% et 12%.
Si la BCE a laissé ses taux inchangés, ainsi que la taille de son programme de rachats d’actifs, elle a également pris de nouvelles mesures pour soutenir les banques.
D’une part, en réduisant encore le taux dans le cadre du programme de TLTRO, qui permettra alors aux banques d’emprunter à -1% lors des prochaines opérations.
Et d’autre part, en lançant une nouvelle série d’opérations de refinancement, à plus long terme, d’urgences non ciblées en cas de pandémie (PELTRO). Ces opérations consisteront en sept opérations de refinancement supplémentaires commençant en mai 2020 et arrivant à échéance dans une séquence échelonnée entre juillet et septembre 2021. Elles seront effectuées sous la forme d’appels d’offres à taux fixe, la totalité des soumissions étant servie, avec un taux d’intérêt inférieur de 25 points de base au taux moyen des opérations principales de refinancement en vigueur pendant la durée de chaque opération de refinancement à plus long terme.
Mais la BCE est bien consciente que son programme PEPP, de rachats d’actifs, ne sera pas suffisant et donc « le Conseil des gouverneurs est tout à fait prêt à augmenter la taille du PEPP et à ajuster sa composition, autant que nécessaire et pour aussi longtemps que nécessaire”, a déclaré Christine Lagarde.
Cette dernière a, à peine, fait allusion à la nécessité de voir l’UE agir, faisant presque preuve d’un fatalisme désespéré et se raccrochant à ses notes, elle a donné le sentiment de se perdre entre le PEPP, le PELTRO et les autres mécanismes qui semblaient comparable à la lance de Don Quichotte contre les moulins à vent.
Et pourtant la situation exige des réponses rapides et solidaires de la part de l’UE, de gouvernements capables de prendre à bras le corps les défis, d’hommes et de femmes politiques qui mettent de côté la politique politicienne pour répondre aux enjeux de la crise.
Car en attendant, je pourrais reprendre ma litanie de jeudi où chaque phrase commençait par « nous avons eu ». Car nous avons encore eu beaucoup d’ indices décevants et qui montrent l’ampleur de la crise.
En France, non seulement comme signalé jeudi, la croissance a chuté à des niveaux inédits, mais en plus l’inflation est tombée à 0.5% en taux annuel, soit son niveau le plus bas depuis octobre 2016.
En Espagne, l’inflation est passée de 0.1% à -0.6% en taux annuel, alors que la croissance a chuté de 5.2% au premier trimestre, soit un recul de 4.1% en taux annuel contre 1.8% le trimestre précédent. Et la situation sera pire au second trimestre si l’on se base sur l’indice PMI manufacturier pour avril qui est attendu à 34 contre 45.7 le mois passé.
En Italie, cet indice PMI manufacturier devrait passer de 40.3 à 30 ce qui annonce une chute du PIB plus marquée, alors que ce dernier a chuté de 4.7% au premier trimestre. Soit un recul de 4.8% en taux annuel contre un taux de 0.1% le mois précédent. Selon Moody’s, l’économie italienne devrait se contracter de 9.3% cette année et rebondir de 6.1% l’année prochaine.
Résultat, la croissance dans la zone euro a reculé de 3.8% au premier trimestre, soit un taux annuel de 3.3% et l’inflation (voir graphique) est tombée à 0.4% contre 0.7%.
Assez curieusement l’euro s’est renforcé après la réunion de la BCE et cette avalanche de chiffres.
Mais malgré les propos de Christine Lagarde une certaine tension s’est de nouveau fait sentir sur les taux dans la zone euro. Elle a beau avoir répété plusieurs fois « nous ne tolérerons aucun risque de fragmentation”. Et que « nous voudrons nous assurer que les flux de crédit à l’économie, que l’orientation et la transmission de notre politique monétaire sont efficaces, et nous le ferons dans n’importe quel pays qui doit bénéficier de nos déterminations”, le spread entre le bund et le taux italien s’est un peu tendu.
Tensions entre la Chine et les Etats-Unis
Comme si la situation n’était déjà pas assez compliquée comme cela, l’administration Trump continue de blâmer la Chine pour l’épidémie de Covid-19 et il est question que les États-Unis “élaborent” des mesures de rétorsion contre la Chine au sujet de l’épidémie, qui pourraient inclure de nouveaux droits de douane.
Le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a déclaré qu’il existe “d’énormes preuves” montrant que l’épidémie a débuté dans un laboratoire de Wuhan.
Avec plus de 68.500 morts, les Etats-Unis sont particulièrement touchés et Trump veut tout faire pour détourner l’attention des Américains et la Chine est le bouc émissaire parfait pour cela.
Le ministère américain du commerce, l’État et d’autres agences cherchent des moyens de pousser les entreprises à délocaliser leurs approvisionnements et leur production hors de Chine. Des incitations fiscales et des subventions potentielles à la relocalisation font partie des mesures envisagées pour encourager les changements.
Résultat de cette nouvelle escalade, comme le montre le graphique, le yuan a reculé par rapport au dollar.
A côté de cela, les indices aux Etats-Unis ne sont guère plus brillants qu’en Europe, comme le montre le graphique de l’indice ISM manufacturier, avec en particulier une chute spectaculaire des news orders. Ce que devrait confirmer le chiffre des commandes en usine qui devrait chuter de 9.4%.
Et indicateur hebdomadaire, les inscriptions au chômage ont été de 3.839 millions de personnes en plus, soit 30 millions depuis le 21 mars, ce qui représente 18.4% de la population active.
Dans le tableau mensuel, il faut évidemment pointer la chute du prix du baril depuis le début de l’année. A propos du pétrole, le nombre de puits de pétrole aux Etats-Unis est passé de 465 à 408 en une semaine.
Il faut aussi pointer la chute du rouble, du réal brésilien, du peso mexicain, de la livre turque et de la couronne norvégienne depuis le début de l’année.
Et pour terminer sur un point très pratique et parce qu’il est parfois très compliqué de s’y retrouver, ma collègue Géraldine Thonnard, Conseiller Juridique – Juriste d’entreprise, a réalisé une synthèse très complète des mesures de soutien aux personnes (physiques ou morales) subissant l’impact économique du coronavirus que vous pouvez retrouver via ce lien. https://www.cbc.be/private-banking/fr/a-propos-de-nous/actualite/coronavirus-mesures-de-soutien-impact-economique.html?utm_source=Ambassify&utm_medium=landing&utm_content=Quelles%20sont%20les%20mesures%20de%20soutien%20disponibles%20pour%20les%20particuliers%20et%20les%20entreprises%3F&TYPE=sm&CID=priv_crs_202018_na_actualite_corona&PLA=na_na_amb_na_na_org&CRE=link_na_mesuresoutien_fr