Un accord, oui mais …

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Les marchés ont salué l’accord entre les Etats-Unis et la Chine, mais pour autant l’euphorie n’est pas de mise, sauf peut-être pour les indices boursiers américains, car le terme temporaire ne rassure pas tout le monde.

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Les marchés ont salué l’accord entre les Etats-Unis et la Chine, mais pour autant l’euphorie n’est pas de mise, sauf peut-être pour les indices boursiers américains, car le terme temporaire ne rassure pas tout le monde.

Accord temporaire donc

L’accord est en effet effectif pendant 90 jours et prévoit que les États-Unis réduiront de 145% à 30% les droits de douane supplémentaires qu’ils ont imposés en avril aux produits chinois, et la Chine va ramener les droits de 125% à 10%.

Selon le secrétaire américain au Trésor, Scott Bessent, « nous avons tous deux intérêt à ce que le commerce soit équilibré, et les États-Unis continueront d’œuvrer en ce sens ».

Et de rajouter « ce qui s’est passé avec ces droits de douane très élevés (…) était l’équivalent d’un embargo, ce qu’aucune des deux parties ne veut. Nous voulons des échanges commerciaux ».

Mais comme le diable se cache dans les détails, cet accord ne concerne pas certains droits de douane sectoriels qui demeurent ou même pourraient être rajoutés.

Cependant, clairement l’accord est plus positif qu’espéré, ce qui explique le rebond du dollar, et surtout des indices boursiers américains, et aussi parce que la Chine a également levé toutes les autres restrictions qu’elle avait mis en place en réaction.

Mais les entreprises américaines ne savent plus sur quel pied danser, reconstituer des stocks en prévision de la prochaine escalade ou bien réduire les stocks déjà constitués ?

Selon l’agence de notation Fitch, le taux effectif des droits de douane aux États-Unis est désormais de 13,1 %, ce qui représente une baisse notable par rapport aux 22,8 % enregistrés avant l’accord, mais reste à des niveaux observés pour la dernière fois en 1941 et bien plus élevés que les 2,3 % enregistrés à la fin de l’année 2024.

C’est dans ce contexte plus qu’incertain que seront publiés, cet après-midi, les chiffres d’inflation aux Etats-Unis, avec comme interrogation de savoir s’ils pourraient influencer la prochaine décision de la FED. L’inflation est attendue inchangée à 2,4% et l’inflation sous-jacente à 2,8%, ce qui a priori ne devrait pas entraîner de réactions.

Dans la peau des banquiers centraux

Si les marchés ont salué l’accord, les responsables des Banques centrales, et en particulier ceux de la FED, ont dû se dire qu’ils avaient bien fait de ne pas se précipiter pour abaisser les taux.

Et ce n’est pas sans raison que le rendement du Treasury 2 ans est reparti à la hausse, le marché réduisant le nombre possible de baisses des taux de la part de la FED.

Et la gouverneure de la FED, Adriana Kugler, a été on ne peut plus explicite, estimant que la pause de 90 jours sur les prélèvements à l’importation à des niveaux qui menaçaient d’interrompre le commerce bilatéral réduisait les chances que la Banque centrale américaine doive abaisser les taux d’intérêt en réponse à un ralentissement de l’économie.

Mais des droits de douane à 30% restent élevés, avec comme conséquences de peser sur l’économie et de provoquer une augmentation des prix.

Même constat du président de la FED de Chicago, Austan Goolsbee, « il est certain que l’impact stagflationniste est moindre que celui de la voie sur laquelle ils étaient engagés. Mais le taux des droits de douane est « trois à cinq fois supérieur à ce qu’il était auparavant, ce qui aura un effet stagflationniste sur l’économie. Il va ralentir la croissance et faire monter les prix ».

Même si ses propos sont intervenus avant l’accord, Isabel Schnabel, membre du conseil d’administration de la BCE, qui s’est exprimé vendredi, va dans le même sens.

Selon elle, « le moment est venu de garder la main. La ligne de conduite appropriée est de maintenir les taux proches de leur niveau actuel, c’est-à-dire fermement en territoire neutre ».

Car pour elle, même si à court terme, l’inflation pourrait même tomber en dessous de l’objectif de 2 % de la BCE, à moyen terme, l’inflation pourrait être stimulée par une augmentation attendue des dépenses publiques, sous l’impulsion de l’Allemagne qui s’est engagée à augmenter les investissements dans la défense et les infrastructures.

Selon Schnabel, « à moyen terme, les risques pour l’inflation dans la zone euro sont probablement orientés à la hausse, reflétant à la fois l’augmentation des dépenses budgétaires et les risques de nouveaux chocs sur les coûts dus aux droits de douane se propageant dans les chaînes de valeur mondiales ».

Et selon elle, « même si l’UE ne prend pas de mesures de rétorsion, la hausse des coûts de production transmise par les chaînes de valeur mondiales pourrait plus que compenser la pression désinflationniste résultant de la baisse de la demande étrangère, ce qui rendrait les droits de douane inflationnistes dans l’ensemble ».

Pour elle, et manifestement pour beaucoup de membres de la FED, dans le contexte d’incertitude actuel, la meilleure position à adopter est celle du « wait and see » pour éviter de prendre des mesures qui seraient vite regrettées.

Le rendement du Bund 2 ans a réagi comme celui du Treasury 2 ans à la hausse, le marché révisant à la baisse les perspectives de nouveaux assouplissements monétaires de la part de la BCE.

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