La Banque du Japon a bien relevé ses taux ce matin, à des niveaux inégalés depuis trente ans, et les décisions, hier, des autres Banques centrales méritent que l’on s’y attarde un peu.
De Tokyo à Londres : la partition des taux
La Banque du Japon a bien relevé ses taux ce matin, à des niveaux inégalés depuis trente ans, et les décisions, hier, des autres Banques centrales méritent que l’on s’y attarde un peu.
Décision de la BOJ
Non seulement elle a augmenté son taux de 0,25 %, le faisant passer à 0,75 %, mais elle a clairement laissé entendre qu’elle était prête à procéder à de nouvelles hausses de taux.
Et d’ailleurs le rendement de l’obligation japonaise à 2 ans a directement réagi à la hausse après la réunion.

Car le communiqué de la BOJ est on ne peut plus clair, « à en juger par les données et les enquêtes récentes, il y a de fortes chances que le mécanisme dans lequel les salaires et l’inflation augmentent modérément en tandem soit maintenu. Etant donné que les taux d’intérêt réels sont à des niveaux significativement bas, la BOJ continuera à augmenter les taux d’intérêt si ses prévisions économiques et de prix se concrétisent ».
Cette décision est intervenue alors qu’étaient publiés les chiffres d’inflation au Japon, qui ont confirmé que l’inflation de base est restée à 3,0 % en novembre, ce qui dépasse largement l’objectif de la BOJ.
Le Nikkei a plutôt bien réagi, soutenu aussi par la hausse des indices boursiers aux Etats-Unis, mais par contre le yen n’a pas profité de cette hausse des taux pour se renforcer.
La plus simple
Concernant les réunions des Banques centrales, commençons en effet par la plus simple, celle de la Banque centrale suédoise qui a laissé ses taux inchangés à 1,75 %.
Et le communiqué a donné la tendance pour l’année prochaine « le conseil d’administration de la Riksbank a décidé de laisser le taux directeur inchangé à 1,75 % et le taux devrait rester à ce niveau pendant un certain temps ».
Elle devrait laisser ses taux inchangés en 2026, avec sans doute une première hausse de taux début 2027.
Celle qui a encore de la marge
La Banque centrale de Norvège, qui a laissé son taux inchangé à 4 %, et qui a aussi donné un message très clair, « les perspectives sont incertaines, mais si l’économie évolue globalement comme prévu actuellement, le taux directeur sera encore réduit dans le courant de l’année prochaine ».
Malgré un taux directeur largement plus élevé que les autres pays, pour autant, elle devrait se contenter d’une, voire peut-être, de deux baisses de taux l’année prochaine.
C’est le message passé par sa gouverneure Ida Wolden Bache, « nous ne sommes pas pressés de réduire le taux directeur. Les perspectives de taux d’intérêt ont peu changé depuis le rapport de septembre ».
Il faut dire qu’avec une inflation à 3 % en taux annuel en novembre, l’inflation est largement au-dessus de l’objectif de 2 % de la Banque centrale.
La plus optimiste ?
La BCE a laissé, bien entendu, ses taux inchangés et devrait les laisser inchangés tout au long de l’année prochaine, ayant révisé à la hausse aussi bien ses prévisions de croissance que d’inflation.
Même si toutes les possibilités restent ouvertes selon Christine Lagarde, car « avec le degré d’incertitude auquel nous sommes confrontés, nous ne pouvons tout simplement pas donner d’indications sur l’avenir ».
Concernant ses prévisions, pour l’inflation globale, elle table sur un taux de 2,1 % en 2025, 1,9 % en 2026, 1,8 % en 2027 et 2,0 % en 2028. Pour l’inflation de base, les prévisions sont de 2,4 % en 2025, 2,2 % en 2026, 1,9 % en 2027 et 2,0 % en 2028.
Selon le communiqué, « l’inflation a été revue à la hausse pour 2026, principalement car les services de l’Eurosystème anticipent désormais un tassement plus lent de l’inflation dans le secteur des services ».
Pour la croissance, la BCE s’est montrée plus optimiste qu’en septembre, et table désormais sur une croissance de 1,4 % en 2025, 1,2 % en 2026 et 1,4 % en 2027.
Pour justifier cette décision, la BCE table sur le fait que la croissance de la production devrait être légèrement plus rapide cette année, car l’économie de la zone euro résiste mieux que prévu à l’impact de l’augmentation des droits de douane américains et des importations chinoises bon marché.
La BCE pourra se réjouir de la décision, ce matin, des dirigeants de l’UE, qui ont finalement décidé d’emprunter des fonds pour financer la défense de l’Ukraine contre la Russie au cours des deux prochaines années plutôt que d’utiliser des avoirs russes gelés.
Mais ces derniers, qui totalisent 210 milliards d’euros dans l’UE, resteront gelés jusqu’à ce que Moscou verse des réparations de guerre à l’Ukraine.
Cette décision a été saluée par Bart De Wever, « il y avait tellement de questions sur le prêt pour les réparations que nous avons dû passer au plan B. La rationalité a prévalu. L’UE a évité le chaos et la division et est restée unie ».
La plus divisée
La Banque d’Angleterre, puisqu’il ne reste plus qu’elle, qui a décidé de réduire son taux de 0,25% mais après un vote très serré, cinq membres sur neuf ayant voté pour la baisse.
Le taux est passé à 3,75 % grâce au vote du gouverneur Andrew Bailey, qui a fait pencher la balance en faveur de la baisse.
Mais pour la suite, elle devrait se montrer très prudente comme l’a souligné son gouverneur « nous pensons toujours que les taux sont sur une trajectoire graduelle vers le bas. Mais avec chaque réduction que nous effectuons, la question de savoir jusqu’où nous irons devient plus difficile à trancher ».
Et il n’est pas le seul à avoir exprimé des doutes pour la suite, l’économiste en chef Huw Pill a déclaré qu’il voyait un plus grand risque de blocage de l’inflation à un niveau trop élevé qu’à un niveau trop bas.
Le taux en sterling à 2 ans semble exclure toute nouvelle baisse de taux en 2026, ce qui sera clairement la grande tendance pour 2026 pour une majorité de Banques centrales.

Des chiffres farfelus
Comment qualifier autrement les chiffres d’inflation publiés hier aux Etats-Unis. Ces chiffres ne sont que partiels, car suite à la fermeture du gouvernement, la collecte des données a été retardée jusqu’à la seconde moitié du mois de novembre, lorsque les détaillants offraient des rabais pour les fêtes de fin d’année.
Pire encore, cette fermeture a empêché le BLS de publier les variations mensuelles de l’IPC de novembre, ce qui a créé des lacunes importantes.
En prenant dès lors toutes les précautions d’usage, l’inflation serait passée de 3 % en septembre à 2,7 % en novembre. De septembre à novembre, l’inflation aurait augmenté de 0,2 %, le BLS s’empressant de préciser qu’il “ne peut pas fournir de conseils spécifiques aux utilisateurs de données pour naviguer dans les observations manquantes d’octobre ».
En excluant les composantes volatiles de l’alimentation et de l’énergie, l’IPC aurait augmenté de 2,6 % en taux annuel en novembre, soit la plus faible progression depuis mars 2021.
En début d’après-midi, je vais publier mon exercice annuel qui consiste à revenir sur mes prévisions de 2025 et à faire mon bilan. Je vous laisse découvrir cela tout à l’heure.
J’en profite pour vous souhaiter une excellente fête de Noël en famille, en profitant de ce moment de partage.
Le blog fait une pause la semaine prochaine, et sera de retour le 29 décembre, mais il faudra attendre le 5 janvier pour découvrir mes prévisions pour 2026.
