Arrêtons-nous sur le nerf de la guerre, à savoir la consommation des ménages américains, et comment elle a réagi depuis le jour de libération du 2 avril dernier.

La consommation commence à marquer le pas
Arrêtons-nous sur le nerf de la guerre, à savoir la consommation des ménages américains, et comment elle a réagi depuis le jour de libération du 2 avril dernier.
Premiers indicateurs
Walmart, considéré comme un baromètre du moral des ménages américains, a annoncé un chiffre d’affaires aux États-Unis qui a dépassé les attentes au premier trimestre, mais aussi qu’il allait augmenter ses prix dans le courant du mois.
Selon le directeur général du groupe, Doug McMillon, « nous ferons de notre mieux pour maintenir nos prix aussi bas que possible, mais compte tenu de l’ampleur des droits de douane, même aux niveaux réduits annoncés cette semaine, nous ne sommes pas en mesure d’absorber toute la pression compte tenu de la réalité des marges étroites du commerce de détail ».
Et Walmart s’est montré très prudent pour la suite, et n’a pas donné de prévisions de bénéfice pour le deuxième trimestre.
Ces annonces confirment que ce n’est qu’au milieu de l’année que se feront réellement sentir les effets de la hausse des droits de douane.
Quoique, les ventes au détail ont déjà fortement ralenti en avril et les prix de gros des services, tels que les billets d’avion et les chambres d’hôtel, ont baissé le mois dernier, signalant également une demande en baisse.
Les ventes au détail ont augmenté de 0,1 % le mois dernier, après une hausse de 1,7 % en mars. Et les ventes au détail excluant les automobiles, l’essence, les matériaux de construction et les services alimentaires ont baissé de 0,2 % après avoir augmenté de 0,5 % en mars.
Ce qui pourrait paraître surprenant, c’est que les prix à la production ont chuté de 0,5%, essentiellement parce que le coût des services a connu sa plus forte baisse depuis 2009, tiré vers le bas par le fléchissement de la demande de transport aérien et d’hébergement hôtelier. En taux annuel, les prix à la production sont passés de 3.4% en mars à 2.4% en avril.

Ce fléchissement de la demande de transport aérien et d’hébergement est la conséquence d’une forte chute du tourisme, en particulier des Canadiens, mais pas que.
Mais si le prix des services a chuté, en revanche, les prix des biens de base ont augmenté de 0,4 %, la plus forte hausse depuis janvier 2023, ce qui indique que les producteurs de biens répercutent les droits de douane.
Chiffres sur le PIB
Contre toute attente, l’économie britannique a connu une croissance plus forte que prévu au premier trimestre avec une hausse de 0,7% contre 0,1% au dernier trimestre 2024.
Le sterling, qui bénéfice d’un différentiel de taux favorable, est resté très ferme par rapport à l’euro après la publication de ce chiffre, qui place la Grande-Bretagne sur la première marche du podium des pays du G7.

Même si elle a ralenti par rapport au trimestre précédent, la croissance en Pologne a été de 0,7% contre 1,4% au quatrième trimestre, mais elle a fait nettement mieux que les 0,1% qui étaient attendus.
En Suisse, le PIB a augmenté de 0,7%, mieux que prévu, contre un taux de 0,5% au quatrième trimestre 2024.
La zone euro et l’UE ont toutes les deux connu une croissance de 0,3% au premier trimestre, contre des taux de 0,2% et 0,4% respectivement au quatrième trimestre 2024.
Par contre, et le chiffre a été publié ce matin, la croissance au Japon s’est contractée de 0,2% au premier trimestre contre un taux de 0,6%, soit un taux annuel qui est passé de 2,2% à -0,7%.
Cette baisse est due à la stagnation de la consommation privée et à la chute des exportations, avant même le début de la hausse des tarifs douaniers.
Les exportations ont baissé de 0,6%, alors que les importations ont augmenté de 2,9%, ce qui signifie que les exportations nettes ont réduit le PIB de 0,8 points.
Tous ces chiffres de la croissance au premier trimestre sont cependant déjà une image du passé et ne reflètent pas encore l’impact de la guerre commerciale, car depuis lors ..
Le monde a changé
C’est en substance le message que Powell a voulu faire passer lors d’une intervention hier, s’abstenant en revanche de faire la moindre référence aux derniers soubresauts liés à la guerre commerciale.
Powell estime que « nous pourrions entrer dans une période de chocs d’offre plus fréquents et potentiellement plus persistants, un défi difficile pour l’économie et les Banques centrales ».
Et de poursuivre, « l’environnement économique a changé de manière significative depuis 2020, et notre examen reflétera notre évaluation de ces changements ».
Preuve de ces changements, il s’attend à ce que l’inflation des dépenses de consommation des ménages en avril tombe à 2,2%, « résultat historiquement inhabituel » de désinflation sans dommages majeurs pour l’économie.
Mais cette situation ne tient évidemment pas compte de l’impact des hausses des tarifs douaniers et ne durera dès lors pas.
Se pose la question de savoir comment la Banque centrale peut appréhender cette situation nouvelle, et Powell a reconnu que « dans les discussions que nous avons eues jusqu’à présent, les participants ont indiqué qu’ils pensaient qu’il serait approprié de reconsidérer la politique monétaire ».
Et de préciser, « lors de notre réunion de la semaine dernière, nous avons eu un point de vue similaire sur le ciblage de l’inflation moyenne. Nous veillerons à ce que notre nouvelle déclaration de consensus soit robuste face à un large éventail d’environnements et de développements économiques ».
Cela pourrait signifier que la FED, qui avait toléré une inflation plus élevée en prenant plus en compte l’état du marché de l’emploi, pourrait modifier son approche. C’est en tout cas manifestement le sens du message de Powell qui a conclu en parlant de tolérer une inflation plus élevée, « l’idée d’un dépassement intentionnel et modéré s’est avérée hors de propos dans nos discussions politiques et l’est encore jusqu’ici ».
