L’Europe paiera un plus lourd tribut dans une guerre commerciale avec les Etats-Unis, car elle est nettement plus fragile et surtout pas assez préparée, même si elle sait maintenant comment va agir Trump.
La BCE et la FED pourraient bien ne plus utiliser la même pédale à l’avenir
L’Europe paiera un plus lourd tribut dans une guerre commerciale avec les Etats-Unis, car elle est nettement plus fragile et surtout pas assez préparée, même si elle sait maintenant comment va agir Trump.
Une Europe inquiète
Preuve de cette inquiétude, un indicateur clé des attentes du marché en matière d’inflation à long terme dans la zone euro est tombé sous la barre des 2 % pour la première fois depuis juillet 2022, hier.
Cet indicateur est le swap d’inflation à cinq ans dans cinq ans, qui est considéré comme un signe que les investisseurs pensent que la croissance chancelante signifie que l’inflation pourrait être inférieure à l’objectif de la BCE.
Cet indicateur est en tout cas très suivi par la BCE, car il reflète une véritable inquiétude sur l’inflation mais aussi indirectement sur l’état de l’économie.
Après la publication des indices PMI, cet indice vient renforcer le sentiment que la BCE doit accentuer ses baisses de taux, compte tenu de la dégradation de la situation économique, des risques que font peser les hausses des tarifs douaniers et du risque de voir l’inflation passer sous les 2%.
Car clairement l’Europe, déjà fragilisée, souffrira plus d’une guerre commerciale comme je l’ai évoqué en direct sur la Première hier soir.
Mario Centeno, le gouverneur de la Banque centrale portugaise, n’a pas dit autre chose en soulignant que l’économie stagnait, et que les droits de douane que le président Trump entend imposer constituent une nouvelle menace. Il a également mis en garde la BCE contre des baisses de taux trop tardives.
Même son de cloche de la part du vice-président de la BCE, Luis de Guindos, qui a estimé que la croissance devenait la principale préoccupation de la Banque et que les droits de douane risquaient de déclencher un cercle vicieux de guerre commerciale.
Une économie solide
En parlant de l’économie américaine évidemment, avec pour preuve, la confiance des consommateurs américains qui a atteint son plus haut niveau depuis 16 mois en novembre, grâce à l’optimisme concernant le marché de l’emploi, aux attentes d’une baisse de l’inflation et à l’augmentation des prix des actions au cours de l’année prochaine.
Et sans aucun doute aussi à la victoire éclatante de Trump qui a provoqué une certaine euphorie.
Les attentes moyennes des consommateurs en matière d’inflation au cours des 12 prochains mois sont tombées à 4.9 %, le niveau le plus bas depuis mars 2020, contre 5.3 % en octobre. Néanmoins, les prix élevés restent une préoccupation, les consommateurs déclarant qu’une baisse des prix est leur principal souhait pour la nouvelle année.
Cette euphorie devrait perdurer avec, cet après-midi, une confirmation du chiffre de croissance de 2.8% de l’économie américaine au troisième trimestre. Mais le Core PCE devrait remonter légèrement en passant de 2.7% à 2.8%, ce qui indique que la baisse des taux devrait ralentir.
Et justement, hier, ont été publiés les minutes de la dernière réunion de la FED, qui montrent que les responsables semblaient divisés sur la question de savoir jusqu’à quel point ils devraient réduire les taux d’intérêt.
On peut lire dans ce compte-rendu que « de nombreux participants ont observé que les incertitudes concernant le niveau du taux d’intérêt neutre compliquaient l’évaluation du degré de restriction de la politique monétaire et, selon eux, rendaient appropriée une réduction progressive de la politique de restriction ».
Et de rajouter, « les participants ont noté que les décisions de politique monétaire n’étaient pas préétablies et dépendaient de l’évolution de l’économie et des implications pour les perspectives économiques… Ils ont souligné qu’il serait important que le Comité l’indique clairement lorsqu’il ajuste l’orientation de sa politique ».
Elément sans doute important à retenir de ce rapport, « certains participants ont noté que le Comité pourrait mettre en pause son assouplissement du taux directeur et le maintenir à un niveau restrictif », si l’inflation restait trop élevée.
On le voit la situation est fondamentalement différente de part et d’autre de l’Atlantique. Et si la FED va encore baisser ses taux en décembre, elle devrait par la suite mettre le pied sur le frein. Par contre, la BCE, qui va aussi baisser ses taux en décembre, devrait clairement pousser le pied sur l’accélérateur.
Comme la Banque centrale de Nouvelle-Zélande ?
Qui a réduit ses taux pour la troisième fois en quatre mois ce matin et qui a annoncé une poursuite de l’assouplissement plus important. Pourquoi pas en effet voir la BCE baisser ses taux de 0.50% à chaque réunion pour donner un coup de fouet à l’économie européenne ?
Pour revenir à la Banque centrale de Nouvelle-Zélande, elle a réduit son taux de 0.50% pour le porter à 4.25%. Et elle devrait poursuivre son assouplissement comme l’a déclaré son gouverneur, Adrian Orr, « même avec 50 points de base, nous restons quelque peu restrictifs. Il y a un écart de production important, une capacité de réserve importante, donc 50 points de base nous ont semblé appropriés ».
La prochaine réunion ayant lieu en février, la Banque centrale disposera de nouvelles données pour appréhender au mieux la situation, et Orr a estimé que le taux neutre devrait être atteint d’ici la fin de l’année 2025 et devrait se situer entre 2.5% et 3.5%.
Si l’impact de cette décision a été limité sur le dollar néo-zélandais, en revanche les menaces de Trump ont pesé sur le dollar canadien par rapport au dollar américain et également sur le yuan.