Le basculement dans le chaos du commerce international a commencé et ce n’est que les prémices d’autres bouleversements aux Etats-Unis qui ne seront pas sans conséquences pour le système financier mondial et pour l’équilibre mondial.

Le crépuscule des certitudes économiques
Le basculement dans le chaos du commerce international a commencé et ce n’est que les prémices d’autres bouleversements aux Etats-Unis qui ne seront pas sans conséquences pour le système financier mondial et pour l’équilibre mondial.
Un acteur menacé ?
La Chine est évidemment un acteur dans le gigantesque puzzle du commerce international et se retrouve en première ligne dans la recomposition du nouveau paysage.
Mais il lui faudra du temps pour changer son modèle et en attendant elle fait toujours face à ses propres fragilités.
Ainsi les prix à la production ont baissé plus que prévu en juillet, tandis que les prix à la consommation sont restés inchangés, soulignant l’impact de la faiblesse de la demande intérieure et de l’incertitude commerciale persistante sur le moral des consommateurs et des entreprises.
Les prix à la production sont en baisse alors que les autorités chinoises se sont attaquées aux surcapacités de production dans certains secteurs, mais manifestement sans grand succès jusqu’à présent.

Les prix à la production ont reculé de 3,6%, en taux annuel, contre une baisse attendue de 3,3%, même si d’un mois à l’autre le recul n’a été que de 0,2% contre -0,4% en juin.
Autre point de préoccupation pour les autorités, la faiblesse de la demande qui persiste, avec un indice des prix à la consommation qui est resté stable en taux annuel en juillet contre une hausse de 0,1% en juin.
Petit signe de reprise, sur une base mensuelle, l’inflation a augmenté de 0,4 %, contre une baisse de 0,1 % en juin.
Et alors que les nouveaux tarifs sont en place pour la majorité des pays, de façon très provisoire, ne nous faisons aucune illusion, demain est la date limite supposée pour un accord commercial entre les États-Unis et la Chine.
Mais à ce stade, tout le monde s’attend à ce qu’elle soit prolongée, tout en sachant que si rien de concret, et surtout d’acceptable pour l’Ukraine, ne sort de la rencontre entre Poutine et Trump vendredi, de nouveaux tarifs punitifs pourraient être appliqués à la Chine.
Le choc sur le marché de l’emploi aux Etats-Unis
Les chiffres sur le marché de l’emploi publiés il y a une semaine aux Etats-Unis ont été un choc, et le risque inflationniste est passé au second plan. Même si demain les chiffres d’inflation sont attendus en hausse à 3% contre 2,9% pour l’inflation sous-jacente.
Comme le montre le graphique de l’évolution du rendement du Treasury 2 ans, la publication du chiffre des créations d’emploi a provoqué une forte réaction sur le marché obligataire.

Et la probabilité d’une baisse des taux en septembre de la part de la FED a grimpé à 90% après ces chiffres.
La vice-présidente de la FED chargée de la supervision, Michelle Bowman, qui s’est opposée au statu quo en juillet, est revenue sur la fragilité du marché de l’emploi.
Pour elle, la FED aurait dû agir car « prendre des mesures lors de la réunion de la semaine dernière aurait permis de se prémunir de manière proactive contre le risque d’une nouvelle érosion des conditions du marché du travail et d’un nouvel affaiblissement de l’activité économique ».
Elle fait le constat que le rapport sur le marché de l’emploi a montré que le taux de chômage était passé à 4,2 %, « proche d’être arrondi à 4,3 % ».
Mais surtout que ce rapport comprenait également des révisions des données publiées précédemment, montrant que les gains d’emplois ont fortement ralenti au cours des trois derniers mois pour atteindre une moyenne mensuelle de 35. 000.
Pour Bowman, « ce chiffre est bien inférieur au rythme modéré observé au début de l’année, probablement en raison d’un ralentissement significatif de la demande de main-d’œuvre ». Et dès lors pour elle, « mon résumé des projections économiques prévoit trois réductions pour cette année, ce qui est conforme à mes prévisions depuis décembre dernier, et les dernières données sur le marché du travail renforcent mon point de vue”.
Ce chiffre de 35.000 est en effet particulièrement interpellant, car les économistes considèrent généralement que 100.000 créations d’emplois par mois correspondent à un marché du travail stable.
Concernant le risque inflationniste, elle estime que les données récentes sur l’inflation ont également renforcé sa confiance dans le fait que les tarifs douaniers ne conduiront pas à une inflation persistante.
Baisse du prix du baril
Les prix du pétrole ont encore chuté ce matin, prolongeant des baisses de plus de 4 % la semaine dernière.

Ce recul s’explique par des attentes d’une fin potentielle des sanctions contre le pétrole russe en cas d’avancées significatives lors de la rencontre Poutine-Trump.
Mais cette baisse pourrait n’être que temporaire, car si les pourparlers de paix échouent et que le conflit s’éternise, le marché pourrait rapidement adopter une position haussière.
Mais ce qui a également joué à la baisse sur les prix est la mise en place des tarifs douaniers qui vont inéluctablement peser sur la croissance mondiale.

Cela ne revient-il pas a une remise en question forcée de la Chine ou de l’Europe ?
L’article laisse entendre que la Chine et l’Europe sont poussées à revoir leurs certitudes mais pas tout à fait pour les mêmes raisons.
Pour la Chine, la remise en question est surtout économique et structurelle :
• La faiblesse de la demande intérieure et la baisse prolongée des prix à la production signalent que son modèle centré sur l’exportation et l’investissement industriel ne suffit plus à maintenir une croissance vigoureuse.
• Les tensions commerciales avec les États-Unis créent un risque de réorientation forcée des flux avec moins de débouchés faciles sur les marchés occidentaux.
• Ce contexte oblige Pékin à réfléchir à une économie plus tirée par la consommation domestique et les services, ce qui est un changement profond.
Pour l’Europe, la remise en question est plus stratégique et géopolitique :
• Elle subit les contrecoups des tensions sino-américaines et de la volatilité des prix de l’énergie, sans en être un acteur principal.
• Sa dépendance énergétique et industrielle la rend vulnérable à des décisions prises ailleurs (OPEP+, sanctions russes, politiques américaines de subventions industrielles).
• Elle doit décider si elle continue à jouer un rôle d’“amortisseur” diplomatique et commercial ou si elle adopte une position plus autonome avec une stratégie industrielle et énergétique moins dépendante.
En d’autres termes, la Chine doit repenser son modèle de croissance tandis que l’Europe doit repenser son positionnement dans le nouvel échiquier mondial et les deux sont plus subis que choisis, d’où l’idée de “remise en question forcée”.
Bonjour,
Merci pour votre réflexion très pertinente et en effet il s’agit bien d’une remise en question forcée pour la Chine et l’Europe.
Bonne journée.
Bernard Keppenne