Les taux obligataires dérapent

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Compliqué ce matin de démêler les faits tellement tout part un peu dans tous le sens, ce qui démontre une certaine nervosité en particulier sur le marché obligataire.

Mode Lungo

Compliqué ce matin de démêler les faits tellement tout part un peu dans tous le sens, ce qui démontre une certaine nervosité en particulier sur le marché obligataire.

Il va falloir s’y habituer

Et pourtant nous étions prévenus, mais malgré cela les sorties de Trump et les rumeurs, qui vont aller bon train, vont rythmer ou faire valser les marchés financiers. Dernier exemple en date, hier, en pleine journée, une information de CNN selon laquelle le président Donald Trump envisage de déclarer l’état d’urgence économique national pour justifier légalement la mise en place de son programme de surtaxes douanières a provoqué une correction sur les bourses européennes et une hausse du dollar par rapport à la majorité des devises.

Alors qu’il n’était même pas encore en fonction, sa victoire, ou plus exactement la perspective de la mise en place de son programme, a manifestement frappé de stupeur les membres de la FED lors de leur réunion des 17 et 18 décembre derniers.

On peut en effet lire dans les minutes de cette réunion, publiées hier, que les participants « ont noté que les récentes lectures plus élevées que prévu de l’inflation, et les effets des changements potentiels de la politique commerciale et d’immigration, suggéraient que le processus pourrait prendre plus de temps que prévu ».

Résultat, « la plupart des participants ont fait remarquer que le Comité pourrait adopter une approche prudente en envisageant de nouvelles réductions ».

Cette prudence s’explique parce que « après avoir incorporé les données récentes et les hypothèses préliminaires sur les changements potentiels de politique, la croissance du PIB réel devrait être légèrement inférieure à la prévision de base précédente, et le taux de chômage devrait être un peu plus élevé ».

Et de conclure que « plusieurs participants ont observé que le processus de désinflation pourrait s’être temporairement arrêté ou ont noté le risque qu’il puisse s’arrêter ».

Ces minutes montrent que même les membres de la FED sont dans l’expectative, qu’une pause dans la baisse des taux est inéluctable et que les prochaines décisions de la FED dépendront des annonces de Trump.

Tensions sur les taux

Comme je l’évoquais hier, les tensions sur les taux obligataires sont importantes et clairement la publication de ces minutes a encore contribué à maintenir la pression sur les taux.

Et la situation est particulière tendue sur le marché obligataire britannique, qui a vu le rendement de l’obligation à 10 ans prendre depuis le début de la semaine 20 points de base, suite à une crise de confiance dans les perspectives fiscales du nouveau gouvernement.

Mais incriminer uniquement le nouveau gouvernement serait réducteur, car cette tension intervient dans un contexte marqué par une petite reprise de l’inflation en Europe et aux Etats-Unis, qui a tiré les taux obligataires vers le haut.

Sans compter évidemment le fait que les mesures de Trump pourraient se révéler inflationniste, confère les craintes exprimées par les membres de la FED lors de la dernière réunion.

La situation est cependant particulièrement tendue pour les taux des obligations britanniques, le rendement du 10 ans atteignant son plus haut niveau depuis août 2008, et celui du 30 ans son plus haut niveau depuis 26 ans. Et dans la foulée, le sterling a très nettement reculé par rapport au dollar.

Comment expliquer cette hausse en particulier en Grande-Bretagne ? En dehors de la tendance générale de hausse des taux obligataires, cette hausse, amorcée en septembre, peut s’expliquer par le fait que les perspectives de baisses de taux de la part de la BoE ont été révisées à la baisse.

Mais sans doute que l’élément dominant est la nécessité pour la Grande-Bretagne d’émettre des emprunts supplémentaires suite à la présentation du budget par le nouveau gouvernement. Dans ce contexte, les investisseurs exigent des rendements plus élevés compte tenu du risque.

Encore l’Allemagne

De nouveaux indicateurs sont venus confirmer que la situation en Allemagne est particulièrement préoccupante. Ainsi, les commandes industrielles et les ventes au détail ont chuté de manière inattendue en novembre.

Les commandes industrielles ont baissé de 5.4% par rapport au mois précédent, avec une baisse de 3.8% des commandes de la zone euro et de 14.8% des autres régions.

De leur côté, les ventes de détail ont baissé de 0.6 % d’un mois à l’autre, ce qui signifie que la consommation ne prend pas le relais. Ce qui est particulièrement inquiétant.

Ce constat ressort aussi d’une étude qui a été publiée hier par la BCE, qui met en évidence que les ménages de la zone euro pourraient continuer à épargner une grande partie de leurs revenus afin de reconstituer la richesse perdue en raison de l’inflation élevée. Ce qui signifie que la consommation risque encore de rester en berne en 2025 et dès lors peser sur la croissance à court terme.

Dans cette étude, la BCE estime que « le taux d’épargne devrait rester élevé à court terme, bien que légèrement inférieur à son pic le plus récent, reflétant en partie la modération des taux d’intérêt ».

Le taux d’épargne des ménages a atteint 15.6% au deuxième trimestre 2024, dernières données disponibles, contre un niveau de 12% à 13% habituellement observé avant la pandémie.

Pour expliquer ce phénomène, l’étude estime que c’est la poussée inflationniste de 2021/2022 qui a érodé la richesse réelle des ménages,  et les incite à reconstituer leur patrimoine. C’est ce qui ressort dans le graphique publié dans cette étude, graphique qui montre que la richesse nette des ménages a commencé à diminuer en 2022 et est revenue à son niveau d’avant la pandémie dans le courant de l’année 2023 (Sources : Eurostat, BCE et Eurostat (QSA) et calculs de la BCE).

Pour terminer sur l’Allemagne, si l’industrie ne se porte pas bien, que la consommation est atone, le secteur allemand de la construction termine l’année 2024 dans une profonde récession.

C’est ce qui ressort des indices PMI de la construction, qui montrent d’ailleurs que la situation en zone euro n’est guère brillante, mais que c’est en Allemagne qu’elle est la plus grave. L’indice a rechuté à son niveau le plus bas depuis huit mois et les entreprises du bâtiment s’attendant à une baisse de l’activité au cours des 12 prochains mois.

L’enquête souligne que « les entreprises de construction allemandes ont continué à faire état d’un manque de nouvelles commandes en décembre, soulignant la poursuite du ralentissement général de la demande de travaux de construction observé depuis près de trois ans. Les données empiriques recueillies dans le cadre de l’enquête ont mis en évidence l’hésitation générale des clients potentiels, due en partie à l’incertitude quant aux perspectives et aux prix élevés des travaux de construction »

Encore un mot sur la Chine

Les prix à la consommation en Chine ont à peine augmenté en 2024, tandis que les prix à la production ont continué à baisser pour la deuxième année consécutive, ce qui souligne la faiblesse persistante de la demande intérieure.

En décembre, l’inflation a augmenté de 0.1%, ce qui signifie que pour l’ensemble de l’année elle a progressé de 0.2% alors que l’objectif officiel était de 3%.

De son côté, l’indice des prix à la production a baissé de 2.3 % en taux annuel en décembre, légèrement mieux que la baisse de 2.5 % enregistrée en novembre.

Ces chiffres montrent que la pression déflationniste est persistante et que les mesures annoncées depuis la mi-septembre n’ont qu’un impact limité.

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